Haïti, vers la stabilité de l’instabilité

4 novembre 2014

Haïti, vers la stabilité de l’instabilité

Des manifestant brandissant carton rouge à l'équipe gouvernementale-©Jean Marc Hervé Abélard (Le Nouvelliste)
Des manifestant brandissant carton rouge à l’équipe gouvernementale-© Jean Marc Hervé Abélard (Le Nouvelliste)

Agitations sociales, scandales judiciaires, Parlement dysfonctionnel, l’avenir politique d’Haïti sombre dans une profonde incertitude. La République se fourvoie dans une impasse inquiétante.

Depuis quelque temps, le pays est sous la menace d’un immense cyclone politique. Aujourd’hui, à bien observer la tendance, certains observateurs pensent que nous y sommes presque. À moins que les pronostics seraient déviés par une prise de conscience des acteurs impliqués dans la crise.

Durant 210 ans d’indépendance, l’histoire de la politique en Haïti est jalonnée par une instabilité chronique. Tel un patrimoine génétique, l’héritage de la politique conflictuelle se transmet de pouvoir en pouvoir. La nation, serait-elle victime de cette fatalité héréditaire ? À chaque régime, ses malversations, sa mauvaise gouvernance. Et les soulèvements populaires n’en finissent point.

En effet, au cours de ces trois dernières années, la chose devient de plus en plus corsée. D’un dossier à l’autre, les conflits s’amplifient entre pouvoir et opposition et autres parties prenantes de la vie nationale. Comme la nuit qui se tue pour donner naissance au jour, chaque crise entraine une autre. Quand ce n’est pas la crise électorale, c’est de l’insécurité. On vit donc dans une continuité de crise. Et l’instabilité s’installe.

Le désintéressement des autorités pour la bonne marche des institutions est sidérant. Président, parlementaires, tout le monde décline de leurs responsabilités. Personne n’est responsable. Sauf le peuple. Celui-ci qui n’est pas toujours lucide dans le choix de ses dirigeants.

Alors, comment comprenez-vous que depuis trois ans, les acteurs politiques haïtiens, ne peuvent pas s’entendre pour la réalisation des élections dans le pays ? Tandis que la non-tenue de ces scrutins cette année, risque d’empirer une situation politique déjà précaire.

En effet, d’après la Constitution en vigueur, la caducité du Parlement arrive au deuxième lundi de janvier 2015. Ainsi, le président Michel Martelly espère pouvoir gouverner par décret. Sinistre projet qualifié de poison pour la démocratie par plusieurs organismes de droits humains.

Également à ce sujet, l’opposition politique et autres secteurs de la vie nationale sont clairs : pas de question que le pays soit dirigé par décret. Au regard de ce qui se passe actuellement, l’inquiétude semble rationnelle.

Entre-temps, les manifestations contre le pouvoir montent en puissance. Le peuple sort son carton « rouge » à l’équipe « Tèt kale », jugée incapable de livrer la marchandise. Une bonne partie de l’opposition ne jure que par le départ précipité du chef de l’État. Plusieurs organismes de droits humains dénoncent ce qu’ils appellent des persécutions politiques. Surtout après les arrestations de plusieurs membres de l’opposition en pleine manifestation.

Gouvernement propagandiste. Opposition en manque d’idéologie. Population dangereusement manipulable, voilà le pays qui marche aveuglement sur un sentier politique comminatoire.

Osman Jérôme

Partagez

Commentaires