Haïti ou chronique d’un pays en état dépressif

Article : Haïti ou chronique d’un pays en état dépressif
Crédit: ©-Jean-Marc-Hervé-Abélard-Le-Nouvelliste
13 avril 2021

Haïti ou chronique d’un pays en état dépressif

Emporté depuis quelques années par les vagues d’une crise politique destructive, jour après jour, le soleil de la paix, du développement s’enfuit de plus en plus du ciel d’Haïti, « un pays qui n’est ni dirigé, ni gouverné », pour reprendre cette célèbre citation du Maitre Monferrier Dorval, bâtonnier de l’ordre des avocats de Port-au-Prince, crapuleusement exécuté le 28 août 2020. 

Les jours passent, les saisons se suivent, les années se succèdent, mais, le rythme de la vie quotidienne en Haïti se bat au son d’une monotonie ponctuée entre autres d’instabilité, de violences, du désespoir, du chômage, d’insécurité, d’ingouvernance, d’une précarité sociale, sans cesse grandissante. Du coup, le pays s’enfonce dans un labyrinthe, de plus en plus sans issue. 

En effet, entre les actes de kidnappings, les massacres répétés dans certains quartiers défavorisés comme Bel-Air, les vols, les viols, des affrontements entre gangs armés, des manifestations anti-gouvernementales […], à chaque jour son lot de mauvaises nouvelles, en provenance d’Haïti, dont la seule évocation aujourd’hui est synonyme de stress, d’angoisse et de nostalgie pour les plus sensibles. 

D’une journée à une autre, entre un rapt par-ci, un assassinat par-là, les drames se multiplient ; et les uns sont parfois plus angoissants que les autres. Difficile qu’une semaine soit écoulée, sans que la société ne se retrouve pas sous le choc face à une quelconque atrocité commise le plus souvent par des individus armés. Impuissant et largué à lui-même, à part quelques mouvements de protestation, le peuple s’emmure dans sa cage d’émoi et d’indignation. 

Entre-temps, dans de pareilles conditions de vie, la joie, la paix, la sérénité, en fait, tout ce qui est sensé lié au bien-être émotionnel de l’homme, est de plus en plus absent en Haïti, où dans certaines zones, la vie des citoyens ne se tient qu’aux nécessités et aux caprices des bandits, qui se montrent incessamment cruels, quand ils doivent commettre leurs forfaits. 

Ballotés alors par les affres de cette situation sociopolitique, qui s’incline plutôt vers un chaos inévitable, entre amertume, rage et un sentiment d’impuissance, ceux qui sont capables ne font que tourner le dos à cette portion de terre qui s’appelle Haïti, livrée entre les mains des groupes de gangs, qui terrorisent la population, sous les yeux complices des autorités, qu’on reproche d’ailleurs d’être de connivence avec certains d’entre eux. 

Ce qui choque encore le plus avec tout ce qui se passe actuellement en Haïti, dont la flambée des actes de kidnappings tient la Une de l’actualité, c’est l’incompétence et l’insouciance des autorités en place, qui ne font presque rien, pour tenter d’éradiquer le problème et assurer au moins la sécurité de la population qui, désormais ne sait plus à quel Saint se vouer.

Par ailleurs, de jour en jour, les gens du pouvoir donnent l’impression d’être atteints d’une certaine forme de schizophrénie, tant ils se montrent déconnecter de la réalité, de ce qui se passe effectivement dans le pays. Car Jovenel Moïse dont le pouvoir devrait prendre fin depuis le 7 février 2021 persiste dans le délire de ses promesses, le Premier Ministre Joseph Jouthe insiste toujours dans sa légèreté de communication, quand il veut s’improviser comique, pendant le pays est l’agonie. Quelle tristesse !

En tout cas, frustrés face à la précarité de la vie, anxieux quant à l’incertitude de lendemain, stressés à cause de l’insécurité générale, dont le phénomène du kidnapping, irrités face à l’incompétence de ceux qui mènent la barque du pays […], aujourd’hui, les Haïtiens sont quotidiennement exposés à toutes sortes de symptômes, pouvant conduire entre autres à des épisodes dépressifs et d’importantes crises émotionnelles. Car désormais en Haïti, c’est le règne du traumatisme. 

Osman Jérôme 

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