Haïti : cette politique qui a tué nos rêves

16 janvier 2015

Haïti : cette politique qui a tué nos rêves

Manifestation antigouvernementale à Port-au-Prince © Jean Marc Hervé Abélard-Le Nouvelliste
Manifestation antigouvernementale à Port-au-Prince © Jean Marc Hervé Abélard-Le Nouvelliste

L’insipide feuilleton de la politique haïtienne est loin de s’arrêter. Car après une fin d’année 2014 pleine en rebondissements, l’année 2015 commence avec les mêmes inquiétudes. En effet, comme c’était prévu, Port-au-Prince entre dans la nouvelle année sous des secousses politiques de grande magnitude. Caducité du parlement, manifestations antigouvernementales, ingérence de la communauté internationale, la sortie durable de la crise semble n’est pas pour demain.

La crise sociopolitique que traverse actuellement Haïti ne serait-elle pas le produit de l’irresponsabilité et de l’incompétence des hommes politiques ? Joseph Michel Martelly qui, à la faveur des élections entachées d’irrégularités, arrive à la tête du pays en mai 2011. Novice sur cette scène différente de la musique, comme ses prédécesseurs, l’ancien chanteur controversé est devenu héritier légitime de cette crise de vision qui manque toujours aux dirigeants haïtiens. Et depuis son arrivée au pouvoir, l’homme « tèt kale » fait face à une opposition politique de plus en plus radicale. Une situation qui n’aura  d’autres effets que de maintenir le pays dans une grogne sociale déjà insupportable.

Mégalomanie des uns, excès de pouvoir des autres, durant presque quatre ans, le Président et ses opposants ont fait de graves tords à la République. Les préjudices institutionnels causés par les bras de fer entre l’Exécutif et le parlement risquent d’induire le pays dans des voies interdites par les normes démocratiques. Ainsi, les valeurs républicaines vont continuer à être foulées aux pieds en Haïti ?

Entre-temps, vu l’incapacité des protagonistes à éviter au pays de nouvelles agitations sociales et politiques, étudiants, professionnels, simples citoyens, nombreux observateurs haïtiens de l’extérieur ont peu d’espoir quant à un redressement de la situation.  Ici en République dominicaine par exemple, certains étudiants finissants qui ont rêvé de retourner en Haïti après leurs études, commencent déjà à changer d’avis. Car selon eux, les conditions actuelles n’inspirent pas de confiance.

Dans une colère à peine supportable, Michel Constant, étudiant finissant en Sciences comptables à UTESA est très pessimiste : « J’ai l’impression que ce pays ne va nulle part, surtout avec cette classe politique de plus en plus minable. Je comptais bien retourner au pays après les études, mais aujourd’hui ça ne tente plus », a regretté le jeune de 26 ans.

Pour sa part, Docteur James Étienne se montre beaucoup plus tranchant : « Il est assez déprimant de constater que le pays se perdure dans une crise politique aussi récurrente. Ce qui contribue à tuer les rêves professionnels de toute une jeunesse, désormais livrée à la merci des débauches mondaines. Comment construire l’avenir d’une société avec des dirigeants incapables d’être à la hauteur de leurs missions ?, a-t-il conclu sur un ton exaspérant.

« Les Dominicains ne veulent plus de nous. Malgré notre statut légal, ils n’ont aucun respect pour nous. Mais que faire, où aller ? À chaque fois que je pense retourner vivre en Haïti, les choses se dégénèrent », a lamenté Rosena Jean, une marchande de produits cosmétiques à Puerto Plata.

Haïti se trouve une nouvelle fois face à un destin politique peu lucide. Un chef de l’État désormais libre à diriger par décret, Evans Paul, le premier ministre désigné doit former son cabinet ministériel, concertation pour la formation d’un nouvel organisme électoral, des manifestations annoncées un peu partout…, personne ne sait ce qui va se passer dans les prochains jours à Port-au-Prince. Mais une chose est sûre, le pays marche vers la stabilité de l’instabilité. .

Osman Jérôme

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Commentaires

Herve
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Non, ce n'est pas cette politique qui a tué nos rêves. C'est notre désengagement, notre passivité, notre obsession à laisser les autres faire de la politique à notre place qui ont tué nos rêves.