Haïti et son rituel électoral

10 juillet 2013

Haïti et son rituel électoral

Un centre de vote-Via moun.com
Un centre de vote-Via moun.com

« Dis-moi qui compose le conseil électoral, et je te dirai qui gagnera les élections ». On est presque fini par s’habituer avec cette singularité électorale en Haïti. Des résultats sont souvent connus même avant l’organisation des joutes, et favorisent bien souvent la consolidation du pouvoir en place. N’était-ce pas le cas, on se demande pourquoi des conseils électoraux partent souvent en exil après les élections ?

Décembre 1990, le pays a fait expérience de ses premières élections démocratiques. Jean-Bertrand Aristide est porté à la présidence par le choix du peuple. Il est renversé peu de temps après par un coup d’état militaire. Et depuis, les crises électorales se suivent et ne s’arrêtent plus.

Tradition électorale litigieuse

De présidence en présidence, de parlement en parlement, ces dernières années, la contestation électorale devient une habitude dans la vie politique haïtienne. Des sénateurs, des députés, des maires, des élus contestés, la République en a fait l’expérience. Et a bien évidemment payé le prix.

Les scrutins sont souvent entachés de fraudes et d’irrégularités. Puis, le feedback est toujours le même : manifs, violences, cassures, oppositions. Donc, toujours une crise post-électorale qui persiste. Comme si la construction de la démocratie et l’Etat de droit se font dans le désordre électoral ?

Ce qui est pire ; ça ne dit rien aux politiciens. Au contraire, les arrange bien dans leur costume d’opportunistes sans scrupules. Quelle mocheté !

Quant à la communauté internationale et aux bailleurs de fonds, ils jouent tout simplement leurs jeux de diplomatie et de démagogie occidentales. Quelles sont leurs implications dans les crises électorales haïtiennes ? Quelles sont leurs partitions dans le processus de la démocratie en Haïti ? Questions pour un champion. Mais ce qui est certain, ils financent toujours les compétitions électorales. Et parfois, chuchotent les mauvaises langues, la communauté internationale a même ses candidats préférés ?

Et les prochaines élections ?

Les prochaines compétitions électorales haïtiennes retiennent les attentions, occupent les débats et suscitent des inquiétudes.

En effet, il a fallu tout un processus houleux pour camper la machine électorale qui doit organiser les élections sénatoriales, locales et municipales d’ici la fin de l’année. S’il y en aura bien entendu. Car jusqu’à présent, aucune date officielle n’est encore fixée.

Malgré la pression des partis politiques, l’incertitude plane encore. N’y a-t-il pas une urgence électorale ? Il y en aura ? Il n’y en aura pas ? On verra bien.

Aujourd’hui, nous avons un collège électoral à la crédibilité douteuse. Des conseillers électoraux qui n’épousent pas la confiance de l’opposition politique qui ne cesse d’ailleurs de s’en plaindre. « De bonnes élections ou l’avion », c’est déjà le slogan d’une partie de l’opposition politique qui préconise l’organisation des élections transparentes et démocratiques.

La maturité démocratique ne s’acquiert jamais dans le vagabondage électoral. Le pays a assez de ce modèle électoral conflictuel. Qu’on a enfin des représentants élus dans la transparence.

Désormais, il est de toute urgence de penser à construire notre idéal démocratique en tant que peuple. Désobstruer le pays de cette tradition électorale litigieuse. Ainsi, vous léguerez aux générations futures, une République digne de son passé.

Bien à vous, chers politiciens, néo-politiciens de mon fier pays !

Osman Jérôme

Partagez

Commentaires

Mylène
Répondre

Je ressens bien ton exaspération, bien compréhensible d'ailleurs. Je me demandais juste : quand tu dis "Ce qui est pire ; ça ne dit rien aux politiciens. Au contraire, les arrange bien dans leur costume d’opportunistes sans scrupules", parles-tu de l'ensemble des hommes politiques ou y a-t-il certains parmi eux dont les voix s'élèvent et veulent améliorer le système ?

Osman Jérôme
Répondre

Intelligente question, Mylène. Tu sais, la fin du monde a été épargnée dans un temps grâce à la fidélité de Noé et sa famille. Donc, y a toujours quelques-uns qui sortent du lot, et font du même coup la différence. Ce serait trop cruel de ma part de mettre tous les politiques haïtiens dans le même sac, mais crois-moi ma sœur, la différence est tellement minime, qu’elle parait invisible. Cependant, ce que je peux te garantir, il y a de l’espoir à l’horizon avec l’engagement certains jeunes qui veulent désormais s’initier dans la politique du pays.

Mylène
Répondre

Ah, ta réponse me rassure un peu, même si évidemment, il est sûr que ces jeunes dont tu parles portent déjà alors une lourde responsabilité qu'il leur faudra (bien) assumer, pour une évolution positive du système. Cela ne va pas être évident, mais l'espoir est là...

Osman Jérôme
Répondre

La détermination est bien la. Et la différence ne se tardera pas à se faire sentir. Ce qui est plus réjouissant dans tout ça, c’est que ça ne concerne pas seulement la sphère politique, mais aussi d’autres secteurs de la vie nationale, dans lesquels, les jeunes qui ont conscience de ce dont ils représentent pour le pays commencent activement par s’engager. Et ceci est un bon signe pour une Haïti qui a tant besoin de respirer un nouvel air sociopolitique pour sa pleine régénération dont nous espérons tous. Seulement, ces jeunes ont besoin d’être encadrés. Et voilà comment ils seront utiles à leur pays chéri.

Nelson
Répondre

On est dans la merde totale avec cette grande interrogation sur la réalisation des élections dans le pays. Mais bon, on est pas du même côté quand à l'avenir. je le dis toujours c'est parce que je suis croyant et par conséquent je crois à un avenir pour ce pays. Sinon avec des raisonnements scientifiques, je dirais qu'il n'y a aucun espoir pour ce grand peuple.

Osman Jérôme
Répondre

Je comprends bien ta frustration, Nelson. Mais essayons tout de même de regarder l’autre face de la monnaie. D'ailleurs, tu connais déjà ma position sur certains sujets, liés à la crise haïtienne. Mais je veux bien faire un peu de crédit à cette tranche de la jeunesse consciente (no zokikifiée), qui veut bien que les choses changent. Nous aussi (toi et moi), nous avons nos responsabilités. Ann pike devan !

Nelson
Répondre

wè restons très positif.

Emilia U. Chaney
Répondre

Mis sur pied à l'automne 2009 dans la foulée d'accusations de partialité formulées à l'endroit de la structure électorale précédente, le CEP devait veiller au bon déroulement des élections législatives, initialement prévues pour février 2010, mais reportées à cause du séisme de janvier.Sa décision, en novembre 2009, de rejeter 14 partis, dont Fanmi Lavalas, le parti de l'ancien président Aristide, a étayé les allégations de ses détracteurs.

William Bayiha
Répondre

C'est fou comme Haiti ressemble à un pays africain. Malgré le fait qu'elle se trouve à quelques milliers de kilomètres, la démocratie de cette vielle nation ressemble à celle de ce cote de l'Atlantique comme deux gouttes d'eau. Je refuse de croire à un fatalisme.

Osman Jérôme
Répondre

La ressemblance est tellement flagrante, que parfois on arrive même pas à faire la différence. Ben, ici en Haiti y a une jeune classe de politiques qui se germe quelque part, on espère à un changement de la chose.